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Sinaï en bas résille
(1996)

3 Mars Dans l'avion de la compagnie ARKIA, vol 742, vers TEL-AVIV


un paquet d'hommes en altitude et moi parmi
ébranlés tous par des célérités de fer
obliques nous montons vers
à travers des épaisseurs de blancs
vers le bleu vers le bleu
le bleu de notre faim
bleu l'intouchable le lisse le vaste le Très-Haut
le bleu vif où boivent les montagnes
Mon Dieu ! ça ne finira jamais ! voix de femme derrière mon siège
Jamais ! répond une autre
neiges ombres et villages
sous l'aile tendue contre le temps
- Mais pourquoi ces attentats ? Qu'est-ce qu'ils veulent donc ?
- Parce qu'il y a des gens qui ne veulent pas la paix.
C'est aussi simple que cela. C'est toujours la même soif de
pouvoir, que voulez-vous, en Israël comme ailleurs .
je suis dans la volonté de la flèche
laissant loin derrière elle
les rites indécents les ventres en travail
les douleurs crues des jours déjà anciens
...
deux heures que nous volons deux heures de plein vol en lumière
après les alpes les mers italiennes
nous allons vers
des pays improbables
vers le Feu qui n'appartient à personne
vers le Feu arborescent qui est la force du voyage

du 4 au 9 Mars : Désert du Sinaï

après Eilat
Taba nous faisons halte
devant un poste militaire
baraquements en face je lis BANQUE MISR
ça ne s'invente pas lance une de nos voix
qui rit de sa trouvaille un soldat aigrement éclairé
seul dans sa cage de bois
écrit comme un exilé
puis le car s'ébroue c'est reparti trouant la nuit rocheuse
la route perd /
embrasse la mer encre ROUGE sur notre gauche
...
je suis couché sur des sables de plage l'aube vacille / s'ouvre
j'attends le rougissement imminent des terres arabes en face
au-delà des eaux et qui marchera sur les eaux jusqu'à moi
j'attends l'éclaboussure cosmique d'une seconde à l'autre
et c'est le coup d e s a n g
sombre qui crève sa poche et se jette sur nous
et derrière nous en éventail sur les hautes bosses de granit et sur la route
où des véhicules vrombissant tranchent des ombres dans les ors et les roses
...
et maintenant route
pour des jours forts au ventre des montagnes
où nous guidera l'inconnu nous quittons la mer à pas résolus
après l'asphalte la pierre
vive effritée récalcitrante
déjà le regard monte-suit le rythme de la roche
les corps craquent
les pieds font geindre les cailloux
notre bédouin file devant nous si droit si pur
son corps limpide coupe dans la matière intacte du paysage
fond râpeux de canyon falaises qui partout se dérochent partout griffées
géants terriblement colère

en route
le sac colle au dos et sur les têtes le soleil danse dur et damoclésien
14 encapuchés s'avancent
4 3 1 2 3 1 ( c'est moi )
bob aventurier casquette parasolaire chapeau de paille plastique keffieh (souvenir d'un trek au désert ) galure à large bord
seul va le guide à tête nue chevelure gorgonale de prophète
son teint de roche brune son oeil dans l'ardeur chromatique des géologies
il est celui qui tire devant ses ouailles ou qui les pousse
l'élu
qui suit son feu et qui possède en lui les mille chemins vers les grands larges du désert
or tout à coup
tandis que nous nous enfonçons dans un entonnoir
brusquement nous nous retrouvons sans lui ( en vérité je l'ai vu entrer dans un trou du terrain discrètement pour se détendre les entrailles )
et quand il nous réapparaît au milieu d'une halte c'est comme un père qui vient à nous notre repère en ces lieux arrachés de lune glabre

on marche nous parlons on s'accouple en tressant nos paroles on se disjoint

et philippe je le verrai aller son pas de quatre en se baignant l'esprit de vain

quand tout à coup au détour d'un mot ah
la soif qui fraîchit tout à coup palmiers
se déride le sec et se couvre le nu impression si rare dans l'aridité générale
c'est l'eau jaillie de la pierre au moment où s'entendaient des murmures contre les
blessures de flèches lancéees par le sublime
on s'arrête on écoute les palmes le vol frais en va-et-vient d'oiseaux qu'on n'aura jamais vus
...
SOUS UN ACACIA à deux branches j'ai voulu dormir et ainsi tout un ciel s'est couronné
D'épines tandis que les rochers tout autour jacassaient en silence mes compagnons de doute car
La nuit tombait dans cet amphithéâtre aux ruines faussement calmes et pacifiques laissaient en eux
Monter les sables tous couchés sous des pierres en suspens la lune s'est alors invitée gonflée de
Lumière torrentielle et commença ses manoeuvres d'insidieuse illumination dans le style d'une
Chasse magique et sans objet aux farines impalpables et moi gisant là sous une nuit de mille et un
Monuments tout à coup immaculés j'étais plein de mots afin de mieux digérer toutes ces
Pierres où la fin embrasse l'origine où ne verdissent ni le chemin ni le temps
Rien qu'une intense paresse couleur d'immensité pourrie
flèche qui souffle annemarie cette nuit-là aura cru dormir sur un nid de fourmis redoutables
Or je verrai le jour à l'heure dite croiser les cuisses velues des branches debout sur mon oeil
Filles d'or sculptées dans la lumière étoilée de dix mille cheveux qui dansent avec les ombres
Bras flamboyants culs en torsade comme les figures d'un rut aux diurnes
Émotions avec l'esprit qui nage dans des formes de corsage et d'hirondelle dans des postures de
Pâtisseries qui ploient sous les vainqueurs dans des balancements de jaunes et d'échappées
...
ciel immobile et nous déambulons
nous sommes dans les plis et arcanes de la terre emmanuelle triangles debout sur triangle
et bernard je le verrai marcher à pas de montre et s'éloigner dans le silence

aride-ardente génuflexion du
sol tenu sous la main et entravé privé d'imagination végétale
sans vêtement ni raison comme un pré à jamais frappé par la colère
spectacle de grande blessure et de pur jugement
et lionel je le verrai zig zag ziguant à tue-tête comme un diablotin pris de vent
crissement des sables et silence écrasé
nous marchons un à un dans l'enfouissement de nos statues
dans le paysage avant-coureur de dépeuplement
chacun accouplé à ses crimes de chanteuse perverse
chambre en effet ce désert où tombent nos robes nos corsets et nos soies
et claire je la verrai aussi marcher duchesse au pas chamelle droite comme un lys sur la Riviera
un vent parleur de rien aux sévérités modulées
scie toute nourriture et prend l'esprit du promeneur
pour y prédire des sentiers sans pilote
des lassitudes à marcher fou et sans témoins
dans des énigmes de miroir
et christian je le verrai aussi tout dernier avec moi à souffler sur un fil

en mal de quoi étions-nous là
le dos et le ventre rêveurs dans une manière d'afficher un visage flottant
sans autre escorte que ces monstrueuses vacances que ces dénivellations onctueuses ces broderies
sur pierre à dire vrai embryons de subjugation plus enthousiaste que géologique
et alain gravement interrogateur je le verrai dévot devant les monts et les merveilles

et maintenant
nous
sommes
devant

ça

Sinaï en bas résille
pour nous
tu as relevé tes jupes
tu as lubrifié
tes lèvres
d'abord nous avons remonté ton lit de sable entre tes cuisses
onctueuse incursion au gré de mille blondeurs / écailles / alvéoles
sans autre pilote que remuante la contemplation en marche
que l'espoir du charme aux lèvres du soulier droit devant droit
dans le rétréci progressif des joues rocheuses d'un côté et de l'autre
cheminement lézardeux à chaque pas ces antres vénériens ce théâtre
en vous demoiselle de plèvres fissures et sinuosités
indisciplinées comme des appels des allusions au saccage des plis
de papier peint des murmures montés lentement des visions
musicales et ordurières signe que mûrit l'enfonçure fatalement
droit dans l'impasse votre trou nostalgique où je m'invite
tout mon corps dans votre intime d'or d'ivoire et d'ombres
des jaunes à regarder candides et somptueux joie des chairs et des rochers
tous baisés sur le haut par la lumière ces dentelles inventives seules ici savourées
pressé je m'introduis aveugle et sans cri dans la faille de vos jambes
dans l'après vos bas noirs la chose merveille ensommeillée
fête mes tâtonnements en totale rupture
après que promené le poisson gigotant baise au coeur la jonquille

me voici devant ça

j'entre en toi raidi par ton étroitesse étranglement qu'il me faut suivre
sans autre adresse qu'intérieur un appétit qui ne voit pas se tord de
contentement tes murs charnus si hauts me font mourir oubli des villes
grandiloquentes et je creuse courbé d'amour ravissement qu'il faut gravir
qui t'a fait ça cette troufaille où pierre et velours se rassemblent
muqueuses de roches et craies aux ocres souples et vineux
et pourquoi dans cet enfoncement de presse et de vidange tout
s'oublie toute vie impersonnelle et bouchonnée s'oublie
veuve de Dieu qui t'a frappée au passage d'un peuple à deux désirs
ta vulve sèche s'avive d'être exposée au feu chair éblouie
épouvantée taillée par le coït absolu comme le mécanisme
épuisant que le ciel réinvente inondation cherche à s'enfuir
et la crue qui fait sa raie mettant les bouchées doubles

et valérie je la verrai jeune mère chaque jour marcher vers ...
le thé était rougi au sucre
préparé sur le tas
par un bédouin
venu

par hasard

là c'est
EIN MELKHA l'oasis aux palmiers
qu'on appelle ainsi pour ces ébouriffures vertes
bouquetant sans ordre au hasard de la vie
un sol taché
de
sel

puis de nouveau nous avons marché contre l'éboulis
tête à tête avec la cascade
notre chef gorgonesque nous avait promis ça
rencontrer le MUR
table qui a renversé sa loi contre nous

et martine je la verrai faire son duo d'humour avec bernard
c'est que nous l'avons longuement attendu l'obstacle crapuleux
au fond de notre marche sans fond la dernière marche
qu'il faudra embrasser verticalement
ce mur dans la vie qui nous a envoûtés tandis que nous manoeuvrions pas à pas dans l'étroit le haut le rongé du chemin
car on nous avait prévenus on nous avait promis ça
la Bête grandeur nature qui bouche notre corps hors notre corps
plus grande que lui qui l'aura nourrie en cours de route
plus haute que lui de l'avoir nourrie avec du vide
avec des excrétions intimes pierres tuméfiées dans la pensée

alors sur la paroi
nos mains s'araignent au lisse
est serrée de nos pieds la moindre bosse
chacun donnant des paroles à chacun
charlotte tu attends un peu
tout va bien denis
à droite il y a une fissure
là c'est bien
maintenant pousse sur ta jambe droite
aïe
pour divertir chacun de son vertige
pour produire la montée de chaque corps
afin qu'il gagne le haut de la Bête
qu'il se mette à marcher de nouveau s'éloigne de ça se sépare du vieil envoûtement


nous nous sommes retrouvés
autour d'un acacia à trois branches hirsute CHANDELIER d'épines
c'est un arbre vivant qui (d)étonne be-au milieu des sables et des pierres
au départ du vaste du chaste d'aucun signe à perte de vue
tous debout autour de lui
avant la dispersion

Gorgonaute dit
Maintenant vous allez marcher comme vous voulez
Regardez devant regardez derrière il faut avoir l'œil ouvert dans tous les sens ou autrement
Chacun pour soi
Tout ça c'est à vous
Perdez-vous
Dans vos pensées et inversement
Regardez marchez comme si vous étiez seul tout seul
On se retrouve au fond à droite vous voyez après la grosse tache noire
et pour finir il ajouta
J'ai appelé ce lieu LE DESERT DU SILENCE
Bien trouvé non

( en entrant à la maison je ruminais dans les encombrements car j'avais faim après avoir proféré des mots de maître et de nègre à des nègres futurs pris dans les cordes du grand Piano chaque jour perpétuait un supplice de roue à l'intérieur de moi étaient chaos et mécaniques insupportées chaque jour je circulais dans ma muraille enclos dans les callosités du quotidien j'émigrais mille fois d'un bout à l'autre d'une seule existence ceint au plus chaud par l'harmonie des sphères j'avais faim devant l'autre que moi grand bonheur sur son séant et sur son trou la fille la soeur splendide étreinte et dérisoire ça que j'étais alors dans la loi du ressassé mer anonyme )

alors chacun se mit en rêve au gré de l'espace et des pas -- 14 à partir librement et dans

l'imaginaire -- 14 à se déhancher cuisses et bras vers l'avant --

et Gorgo je le verrai longtemps resté seul sous son chandelier intouchable

les couples seront devenus un

homme et une femme -- un homme pour combien de temps une femme -- car l'étendue

expose l'esprit -- l'étendue fait mal -- entre les hommes souffle une confuse existence

-- je marche / nous marchons -- dispersés et pourvu qu'entre nos solitudes l'interrogation

ne tourne en terreur -- je pense aux vieux croyants enveloppés de près et de loin par le pourri

des pierres sous le ciel -- à leurs cris comme des gestes à voie haute vers des joies possibles

trop vite obscurcies -- et je me dis qu'il faudra ouvrir grand l'attention d'une existence pas à

pas --

et c'est ainsi que je verrai mariechristine hacher du sable / mâcher du vent avec les pieds

je marche à petits pas sans date ni dieu -- le dernier qui se promène -- son oeil moissonnant
des amplitudes -- son oeil ne manque pas à l'appel des robes soulevées et des ailes pieuses

-- sur un flanc d'erg jaune religieux il suit trois de nos pélerins --

ainsi je verrai lionel s'épuiser les jambes jusqu'à la crête

et je verrai christianmyriam contempler sur le même fil un au-delà de dune

à mon tour j'irai vers le haut -- ma curiosité fait feu sur mon genou malade -- qu'importe --

je sais la grâce promise à moi sur ce mont chauve - je me hisse au sommet par mouvements

désespérés - tendu sans témoin à la verticale et soûl de ma suffocation -- et en effet quand

j'atteindrai mon point de repère je regarderai mes pas monter vers moi comme si un scarabée

et bernard sénec des sables je le verrai si loin sans femme ni bras ni jambes

je suis sur le dos de la dune --- après mon galop de gestes obscènes -- et là quoi -- l'immense

paresse d'une terre défoncée -- rien sur rien que l'étendue -- vasque attendant la pluie en vain

-- je suis une colonne vivante au milieu de deux vides -- sourire à l'intérieur de mon

angoisse --

et maintenant retour à la table morte
ce long plateau devant moi je n'aperçois personne
je marche marche marche à demi perdu

rocs émergés tout près de moi le sable autour les presse
le sable avec des plis de soie
comme des pages de grand livre enfoui figurations mouvantes au gré du souffle
qui s'infiltre entre et va
à peine si persiste une plante
pierres se noient respirent selon que veut le vent

car le VENT pille le rien sans pitié s'écrase contre les yeux
l'esprit s'affole en ce dieu ennemi des hommes
ROYAUME jamais habité jamais peuplé de génération en génération
nul doute qu'ici LA COLERE se soit abattue
cieux ébranlés herbe desséchée le vaste dévastateur
a vendangé de son FEU toute vie

tabula rasa____________________________________________________________________tabula rasa

MIDI tombe comme un fléau sur des blondeurs maculées de pierres
des collines striées et noires
sur moi qui tranche dans le vent
étreint par la révélation du vide
qui marche en serrant bien mon sac
qui marche en forçant le genou
penchant la tête tirant sur le chapeau
marche ou
note en arrêt sur un mot
note encore

je marche comme un ivrogne
secoué comme une cahute
les vannes là-haut contre moi sont ouvertes
en éclats volent mes longues années
leur sable jeté à ma figure
terreur trou traquenard
pour moi habitant de la terre
pour moi violé par le travail
les villes ont des lumières qui dévorent
ont des rues dédalesques
ici c'est table ouverte pour le jour juste
et blond et la nuit noire
et dans la horde des nations
éprises de boissons fortes
je reste encore un affamé qui mange en rêve
et se réveille l'estomac creux

maintenant regroupés 14 nous avançons... 14 inconnus sans tyran ni moqueur... avec Gorgoguide liseur de grand chemin... nous écrasons d'informes tuiles noires qui cliquent / claquent sous nos pas... 14 vies dans la trame du vent... sourds aveugles stupides scellés sans mot dans leur vision... car tout à coup nos yeux précipités vers l'en-bas ... voient
vergers et palmeraie parmi les sables


en minibus sur la route vers Djebel Moussa
parfois je me suis vu en chameau entravé
pattes avant jumelées d'une corde
assez pour alourdir le mouvement et rompre
avec la tête la mécanique des pas appel
du grand espace et corps incroyablement gourd


(note : les trois parties qui suivent intitulées Monter, L'île au sommet,Ravi de mes flambées intimes,
sont à lire de bas en haut. Commencer par Monter)

pour ne jamais franchir le temps
enkylosé d'un sourire élégant
embarrassé de mille réalités légères feu tremblement et nuée noire en moi
seul environné par le vide et le vent
je suis à l'abandon dans un roc citadelle
et dur à cause des ennemis qui désirent sa graisse
mon coeur est gras de superflu et d'abondance
même si à la longue vient l'accalmie
l'ombre froide qui encercle et qui blesse
malgré les refus du corps
la joie lui couvrira les yeux
chacun le suit qui veut gagner sa tête
car le chemin est roi
durcies par un zèle de (g)ravissement
700 marches dans la fable
baignant dans un jus de sueur
plié / droit plié / droit plié / droit
aveugle et courbé d'amour
où souffler sans crier victoire
700 à me rompre le genou 700
et maintenant les marches
cette femme assise offrant son théâtre de lèvres somptueuses où passé le trou noir brûle un or arborescent
dans les viandes assombries de la montagne
sans tâtonnement dans la merveille claire obscurément
cheminement tout droit et dur
je m'allonge raidi de reconnaissance
je m'élève - charnel velours agressé par les angles - dans sa fixité comme l'étranger en mal d'adresse
le chemin me conçoit
moi à lui qui m'étrangle
accouplés que nous sommes
RAVI DE MES FLAMBEES INTIMES


l'exactitude où le rêve s'abîme en la chose
plus haut que la seule fantaisie
sans autre dessein que de cueillir
gravir qu'il faut l'irritation physique
par l'étroitesse de l'étranglement
par l'abandon
vers des joies possibles vite obscurcies
forcés de ne penser qu'à ça
dans un paysage de blessures
ciel immobile et nous déambulons
colonne vivante parmi les pierres
les nôtres s'égrènent et s'aggravent parmi les pierres
car on est loin d'arriver
ça pénètre à droite dans une gorge noire autre inconnu
ce que je vois au-dessus de ma tête la ligne blanche du reste à parcourir au pied de mille griffures pétrifiées
et rien encore ne dit la fin
plein le dos plein le bât
les pieds se broient sur les terres rocailleuses
on chauffe de pied en cap
le genou ne décolère pas
je vacille je répands ma fatigue

et charlotte je la verrai derrière / devant ne parlant qu'à ses pas à l'appel de son nom
je suis l'auteur de mes pas dès l'origine
en lui je renouvelle ma force
car le silence est devant moi
je fixe les hauteurs sans les voir
moi le dernier parmi les derniers
dans l'esprit du marcheur
dans l'ordre du chemin
bout du monde le premier
confins supérieurs de la terre
L'ÎLE AU SOMMET appelle chaque pas

peuple de pierres ayant parole
et qui terriblement me parlent
pierres me grisent d'aride hostilité mais qu'il faut traverser convaincre en montant chaque pas
ce que je vois déjections de falaise et dix mille dents dressées dix mille autres crocs menaçants
je traîne je tire je pèse à mon désir
frôlant bédouins chameaux étrangers acromigrateurs
dans les dures sinuosités de la côte
tout seul
et bientôt seul
si lent
monter tenir ne pas flancher
dans la volonté de la voie
tous allant vers
corps en travail et douleurs crues
où je marche où nous marchons
chemin cynique et tranchant / aux odeurs d'excréments / encombré de peuples divers
le naïf
le rose
vers le rude monter en souffrance
rien ne tremble rien ne brûle
là-haut où rien ne fume
là où campa le peuple
plus haut que les plaines de Raha et de Melga
remonter la vallée de Jethro
plus haut que tous les wadi
monter là-haut l'invisible très-haut
par le Sikket El-Basha
monter par la piste des chameaux
MONTER

ascension du Djebel Moussa ( à lire de bas en haut )


( suite vers le bas )
...TENANT là JE suis las à sommet de fatigue MAINTENANT que j'ai mâché ma crève sur chaque marche ET pieusement battu chaque pierre de ma semelle N'AI plus de voix plus ne sais où aller IMPUR par mon savoir et ma sueur J'HABITE un rêve plein d'idées sans adresse ŒIL en proie à des visions de roches de ciel de vent

et claire je la verrai strip-teasée par la chaleur sous le regard d'un ciel Très-Haut

J'ÉPROUVE le lieu avec sagesse PRIMAUTÉ à la vue à l'éminence adorable LES mains vides j'observe alentour la joie qui me regarde JUSTE tribulation vers la puissance L'OEIL erre de cime en cime POINT de haie MA nourriture est dans la faute MA parole erre de faute en faute JUSQU'À la mort ainsi

et bernard je le verrai saisir ma forme assise au sein du paysage

SUR le dos de l'île aux flancs vertigineux nous admirons l'altitude qui tombe stricte et ne s'interrompt pas ON se déplace aériens sur la fleur des monts glabres comblés d'ailes allant et venant dans le froid qui s'épaissit TOUS dans l'attente du saigneur qui sacrifie en ouest

et les ombres je les verrai pousser leur crue jusqu'aux rives d'Akaba

PUISSE-JE moi aussi monter résolument dans mon existence DÉSENCOMBRÉ de toutes choses qui répandent leur terreur et raconter ces merveilles ET QU'il n'y a pas d'autre lieu que ce lieu RACONTER aux hommes leurs actes selon qu'ils sont et qu'ils seront

et Gorgo je le verrai acculé au balcon nous compter / raconter chaque sommet

C'EST QUE
sur ce radeau lancés dans l'or du couchant les hommes avancent vers l'événement avancent avec leur guide conteur de dix mille ans le prophète rougi par son alliance qui dit le juste poids du sol dont il nous a instruits
Gorgo que j'avais vu tout au sommet des marches vertical devant moi
c'est DESCENDRE qu'il faut à présent
avant la couchaison des ombres
le noir déluge prédateur
de marche en marche le corps oblique
le froid qui blesse et fait trembler
incertitude à fleur du vide
je laisse à leur hauteur les cimes
l'or les raidit durcit leurs traits
je m'engorge dans le passage
par là où j'ai pénétré tant haut
et annemarie je la verrai comme un inconnu à mes trousses
car maintenant je suis mon corps
toujours peinant sur le genou
à peine si regardant le jus noir tout noyer
l'obscurité bondir de pierre en pierre
éteindre les joies bouillonner hors blessures
je me répands vers le bas d'origine
aggravé dur poussé pressé
sur un chemin qui ment de m'être en m'être
et annemarie je la verrai se déplier en flèche sans obstacle et sans gêne les pierres me brassent les pieds et brûlent
et bientôt tout s'efface - NUIT nette et nue
inconnu encore et si loin d'arriver
au front des lampes hurlent des chiens
et christian je le verrai lier parole avec charlotte sans autre voie que dire
quand tout à coup au fond du val percent / se perdent
de fins éclats de monastère
que nos pas font danser ou ravivent
à méandrer sans autre signe
puis nous vient le sol nu la chaussée monacale
les échoppes les cars les lumières
mobiles et immobiles

brutitude douce et rêche entretemps mûr et mégalomaniaque
l'espace en robe d'eau pure et souveraineté de sable rose
nous roulons vers la mer - autre excellence


et moi qui dors je n'en peux plus mangé par tant de mort en MAJESTE
n'en peux plus du soleil qui tranche dans le gras de ma CHAIR
la route mord en droite ligne dans le rêve à fond'erREMENT
14 errants minuscules dans un bus enceints grâce A QUI

pour enfin retrouver l'auberge paillée d'ombre à fleur de mer cadenCEE
et plonger lourds entre deux rives dans l'insomnie des EAUX
où finement des flèches vives agitent des signes tout au FOND
comme des cheveux messagers d'ondes où NOTRE
ultime jugement laisse aux hymnes le soin d'oser d'obscures NAIVETES

10 Mars Dans l'avion vers Paris


abeille d'onyx et d'argent vole au-dessus
des monts je t'offrirai ce bijou d'ailes à piquer sur ton col
abeille d'onyx et d'argent vole au-dessus
de dents la chair du ciel

ma voisine hébraïque ceint de ses bras son fils amant
( mari à l'autre bout du rang est mis comme un gamin )
ma voisine hébraïque a tee-shirt rayé noir et moulant
seins d'amour grands yeux gourmands bleu klein
mère veilleuse à tenir sous son aile trois enfants
trois qui m'attendent
à Orly Sud - aéroport

 

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