Poteaubiographie, de Denis Donikian

par Marc VERHAVERBEKE

 

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24 août 2009


Poteaubiographie est un objet particulier. C’est un livre. Mais c’est d’abord une sculpture. Qui se tient debout. C’est un livre. Qui a deux faces.
Car Denis Donikian a deux langues, l’arménienne et la française. C’est peu de dire qu’il a deux langues. Sa sculpture, sorte de totem, s’achève, en haut, par un masque africain, côté français, et par une tête de Christ, côté arménien. Il y a plusieurs fois…
Mais c’est en bas que ça commence. Car c’est un livre vertical, qu’il faut accrocher au mur comme une toise. Et, comme la sculpture qui y est reproduite, le texte commence à même la terre, sans doute dans les profondeurs, les cimetières d’un génocide, d’un massacre des innocents, car l’enfance, pour Denis, c’est d’abord ce massacre, cette merde, qui lui colle à la peau. Il aurait pu nommer son livre Peautobiographie.
Cette colonne vertébrale qu’il construit par accumulation d’objets, de photos, de couleurs, qui le fait tenir, c’est son histoire. Des dieux, des déesses, des pays, des photos (et pourquoi pas, en partie, Photaubiographie ?), de la curiosité, de la souffrance. Et, sans doute ce qui le sauve d’un destin tracé, c’est de rencontrer «Anh eau de mon avenir» (écrit-il). Il joue avec les mots, assemble, agglomère. Des enfants naissent. Une sienne mythologie se dessine.
Denis Donikian ne creuse pas, lui qui est né de ces morts que dénient « les possesseurs de haches », il élève, plus haut que lui-même, « tout à coup projeté / vers un silence fait de questions ».
Dans un autre texte, qu'on peut lire sur son blog, il écrit : Ne pensez qu’à la partie haute, à celle qui émerge. Vous devez atteindre par le chant cette ligne au-dessus de laquelle la montagne devient un être spirituel. Dessous, c’est comme le socle d’une statue, son assise.  Et plus bas encore, gisent les frontières, grouillent les hommes, se déploient les drapeaux, se multiplient les guerres. Les peuples se lancent des injures, lisent des discours, entretiennent leurs jeux de massacre. La folie nous guette tous. Mais posée sur ce socle, il y a une statue, une statue à nous, une statue qui représente l’un des nôtres. Ne soyez pas des choristes de bronze. Regardez plus haut. Voyez l’art. L’art n’est pas un drapeau. Il fait l’homme. Alors, posez votre voix sur ce socle de pierre et chantez à la bonne hauteur.

 

 

 

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